Plaidoyer pour la protection du corb, ce corbeau des mers

Plaidoyer pour la protection du corb, ce corbeau des mers

En 2013, deux arrêtés préfectoraux ont interdit pendant une durée de cinq ans la pêche sous marine et la pêche de loisir du corb dans les eaux maritimes au large des Régions Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon et Corse. Ces deux arrêtés ont permis pendant presque 5 ans le renouvellement des populations de corbs dans les eaux  françaises de la Méditerranée. Cependant, ces arrêtés sont applicables seulement jusqu’au 23 décembre 2018. Il est indispensable de  les reconduire et à long terme.

patrimoine commun de la Méditerranée Le corb, ce poisson carnivore, surnommé le « corbeau des mers » en raison des croassements qu’il émet avec sa vessie natatoire, est malheureusement méconnu du grand public à la différence de son comparse plus célèbre, le mérou.

Pourtant, avec le mérou, le corb fait partie de ce que l’on pourrait appeler le « patrimoine commun de la Méditerranée ». Placé dans le haut de la chaîne alimentaire, le corb joue un rôle essentiel car sa présence dans les espaces marins permet d’apprécier l’état global de conservation des écosystèmes.

 

 

 

corbeau des mersAujourd’hui, la nécessité de préserver le corb en raison de sa vulnérabilité apparaît clairement. D’ailleurs, en matière de droit international, cette volonté de le protéger s’exprime à travers les annexes III de la Convention de Barcelone et de la Convention de Berne. Ainsi, cette dernière  mentionne le corb parmi les espèces de faune protégées de l’annexe III et prévoit l’obligation pour les Etats parties de prendre les « mesures législatives et réglementaires appropriées et nécessaires pour protéger » ces espèces.  Par ailleurs, le corb est inscrit sur la liste rouge européenne de 2011 de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) parmi les espèces  « vulnérables ». Rappelons que cette liste constitue un inventaire mondial complet de l’état de la biodiversité permettant d’identifier les menaces pesant sur celle-ci.

Cependant, ces textes internationaux et dispositifs d’alerte, n’aboutissent qu’à une protection symbolique des populations de corb. A titre d’exemple la Convention de Berne n’est pas invocable par les particuliers. Ainsi, une personne physique ou morale, ne pourra pas intenter un recours en justice contre l’Etat Français pour défaut de protection du corb et violation des dispositions de la Convention. En effet, celle-ci créant uniquement des obligations entre les Etats parties et non entre l’Etat et ses ressortissants.De même, la liste rouge de l’UICN constitue uniquement un « indicateur » ne créant aucune obligation pour les Etats de prendre des mesures de conservation des espèces.

C’est la raison pour laquelle, il est nécessaire que soient prises en matière de droit français, des mesures législatives et réglementaires visant à protéger de manière effective le corb dans les zones maritimes territoriales.

En effet, en Méditerranée, l’état des populations de corb est certes impacté par la pollution mais la principale menace résulte des pratiques recrudescentes de chasse sous-marine et pêche de loisir de ces dernières décennies.Les corbs sont particulièrement vulnérables à cette pratique en raison de la localisation de leur habitat (facilement accessible pour les plongeurs), de leur comportement (calme) ainsi que de leur reproduction et croissance lente.

Or, avant 2013, aucune réglementation s’agissant des quotas de pêche des corbs n’avait été mise en place. Il était seulement imposé une taille minimale de capture des corbs de 35 cm.

Cette mesure était dotée d’un effet pervers pour la conservation du corb puisque les proies susceptibles d’être capturées étaient les gros reproducteurs arrivés à l’âge mature et donc des individus essentiels pour assurer la pérennité de l’espèce.

L’Etat Français a bien pris en compte cette menace. En effet, en 2013, deux arrêtés préfectoraux ont interdit pendant une durée de cinq ans la pêche sous marine et la pêche de loisir du corb dans les eaux maritimes au large des Régions Provence-Alpes-Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon et Corse.

Ces deux arrêtés ont permis pendant presque 5 ans le renouvellement des populations de corbs dans les eaux  françaises de la Méditerranée. Cependant, ces arrêtés sont applicables seulement jusqu’au 23 décembre 2018.

 

Il apparaît donc nécessaire de les reconduire et à long terme, car une durée de 5 ans est bien trop courte pour prétendre reconstituer à long terme les populations de corb.

En effet, comme démontré dans l’Etude de Jean Michel Culioli (*) , avant d’envisager toute révision du moratoire, il conviendrait de poursuivre cette mesure pendant au moins 5 nouvelles années afin de permettre de combler le déficit des individus de grande taille et d’aboutir à des résultats positifs d’une ampleur équivalente à ceux observés dans les aires marines protégées.

 

 

* Etude de Jean Michel Culioli, Chef de Service à l’Office de l’Environnement de la Corse,  « Contribution à la Connaissance du Corb Sciaena Umbra dans la Riserva naturale di i Bucchi di Bonifaziu évolution des abondances in situ et des captures artisanales de la pêche artisanale depuis 35 ans » Juin 2018

 

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